Prépartion Physique au Hockey sur glace. 

Écrit Par : Alen Suton Kinésiologue

Au Canada, le hockey est le sport national. Il existe une grande fierté pour ce sport et la culture du hockey est fortement imprégnée dans chaque jeune, que ce soit durant un match organisé dans un aréna ou simplement chez des enfants qui jouent dans la rue. J’ai la chance de recevoir  plusieurs joueurs de différents niveaux, comme les vétérans de niveau professionnel qui partagent leur savoir, les nouveaux joueurs qui essaient de prouver qu’ils sont à la hauteur des attentes ou encore les plus jeunes qui rêvent d’avoir leur chance. Cet article fait une analyse complète du hockey, des implications pour bâtir un entraînement et une planification adéquate dans une salle de préparation physique.   

Biomécanique

Contrairement aux autres sports d’équipe, le hockey sur glace comporte plusieurs traits biomécaniques particuliers. Le fait de patiner sur la glace implique des poussées diagonales qui sont alternées et qui exigent une haute vitesse d’exécution. Au sein de cette tâche, on retrouve des mouvements :

 

  • D’extension à la hanche
  • D’abduction de la hanche
  • De rotation de la hanche
  • D’extension du genou
  • De flexion plantaire de la cheville

 La force est transférée vers la jambe d’appui, qui est positionnée en flexion à la hanche, en légère adduction et rotation interne ainsi qu’en flexion du genou et en flexion plantaire de la cheville.

 Plusieurs facteurs influencent la vitesse du joueur sur la glace. En général, les joueurs de haut calibre adoptent une position plus basse sur la glace avec un centre de gravité plus près du sol. Comparativement à la course, le patron de mouvement sur la glace (patiner) exige de plus longs contacts au sol et des foulées plus lentes. Cette information devient importante lors du choix des exercices dans la salle de musculation.

 

 

Skating pattern Contact time (s) Stride Rate (stride/s)
Forward .33 1.64
Cross Over (outside leg) .37 1.55

Cross Over   (inside leg)

.33 1.67
Robert-Lachaine et al. 2012

Il existe peu d’informations sur les patrons moteurs du haut du corps au hockey, mais nous pouvons déduire que les actions sont :

 

  • La rotation et la stabilisation du tronc, impliquant la colonne vertébrale cervicale et thoracique ainsi que les principaux groupes musculaires du haut du corps.

 

  • Des mouvements de l’articulation gléno-humérale dans différents axes.
Analyse générale d’un match de hockey
2.3 cycles de 39,7 secondes (temps d’un shift en moyenne)
27.1 secondes (temps des arrêts de jeu en moyenne)
24.5 minutes (temps total cumulatif)
5552 mètres (distance couverte au total)
Niveau de lactate dans le sang varie entre 8.2 et 13.7 mmol/l
Environ 12-15 shifts par match
Ratio travail/repos de 10:40

Prenez en considération que les données ci-dessus sont un aperçu général permettant de mieux comprendre les implications et les exigences d’un match de hockey. Des variations peuvent se produire selon le niveau, le groupe d’âge et le style de jeu de chaque équipe. 

Blessures

Une étude a été effectuée parmi les joueurs de la LNH au niveau des blessures (Donaldson, Li et Cusimano). Selon leurs données, durant les saisons de 2009 à 2012, 50.9% joueurs ont raté au moins 1 match en raison d’une blessure, avec une moyenne de 8.8 matchs manqués.

870 blessures totales (durant la période d’étude)

1.       241 (27.7%) pied/jambe

2.       165 (19.0%) tête/cou

3.       108 (12.4%) aine

4.       88 (10.1%) épaule

5.       75 (8.6%) bras/main

6.       66 (7.6%) poitrine/abdominaux

7.       127 (14.65%) (pas classifiées)

Plusieurs facteurs sont importants à considérer lors de l’évaluation des joueurs de hockey. La première étape est de questionner l’athlète sur la présence de blessures et d’élaborer un plan d’action pour rétablir le joueur en question. Il est important de travailler avec plusieurs intervenants dans le domaine de la réhabilitation (chiropraticiens, physiothérapeutes, massothérapeutes sportifs, etc.) afin de favoriser un retour rapide à l’entraînement. Notre travail est de prendre en charge les athlètes et de continuer le travail à long terme selon les diagnostiques des spécialistes.

Bilan musculaire et analyse posturale

Une évaluation complète de bilan musculaire et d’analyse posturale est nécessaire pour déterminer la cause d’un problème et pour entamer un plan d’action efficace. Étant donné les demandes spécifiques de l’entraînement sportif et le fait que certains sports provoquent un développement asymétrique des muscles (principalement les sports exigeant un travail unilatéral important comme le hockey),le bilan musculaire des athlètes sera directement lié à ces demandes physiques. Le travail répétitif et spécifique sur la glace peut entraîner des débalancements musculaires entre le côté droit et le côté gauche du corps ainsi que pour les muscles agonistes et antagonistes reliés aux gestes pratiqués.

 

La surutilisation cause les muscles phasiques à devenir faibles et augmente la tension et la rigidité des muscles toniques. Le hockey est un sport où les fléchisseurs de la hanche sont constamment engagés dans une contraction isométrique ou concentrique, ce qui explique pourquoi ces muscles sont souvent suractivés chez les athlètes.

 

Phasique

Tonique

Type

Fibres rapides

Fibres lentes

Respiration

Anaérobie

Aérobie

Fonction

Active

Statique

Dysfonction

Faiblesse

Raccourcissement

Traitement

Renforcer

Étirer

Phasique

Tonique

Grand fessier

Gastrocnémien

Moyen fessier

Soléaire

Droit de l’abdomen

Ischio-jambiers

Dentelé antérieur

Ilio-psoas

Tibial antérieur

TFL

Trapèze inférieur

Droit fémoral

Rhomboïde

Carrés des lombes

 

Trapèze supérieur

 

Grand pectoral

Groupes musculaires

Groupes musculaires

Pour optimiser la performance du coup de patin, il est important d’adopter une posture appropriée. Une déficience au niveau lombaire est souvent observée chez les patineurs.  Certains joueurs ont tendance à courber le dos vers l’avant de façon prononcée (cyphose), alors qu’il est plutôt souhaitable de garder une courbure arrière normale. Un des muscles importants pour effectuer la poussée au patin est le grand fessier. Ce muscle prend origine sur la crête iliaque, le sacrum et le fascia thoraco-lombaire.  Il sera donc étiré si la portion lombaire de la colonne vertébrale se courbe.  L’amplitude de mouvement sera réduite et le joueur sera incapable de produire une poussée pleinement efficace.

Selon une étude, les joueurs de hockey passent 39% de leur shift sur deux jambes (Michael R. Bracko, EdD). Les préparateurs physiques doivent prendre en considération trois facteurs importants :

 

  • La capacité des joueurs à exploser à partir de deux jambes.
  • La position posturale de base et stable.
  • La flexion adéquate au niveau des genoux.

TABLE 1. TIMED SKATING CHARACTERISTICS OF NHL FORWARDS
SKATING CHARACTERISTIC % OF TOTAL TIME ON ICE
Two-foot glide :39
Cruise slide :16.2
Medium intensity skating :10
Struggle for puck or position :9.8
Low-intensity skating :7.8
Backward skating :4.9
High-intensity skating :4.6
Two-foot stationary :3
Two-foot glide with puck :1.4
Medium-intensity skating with puck :0.8
Cruise stride with puck :0.6
Struggle with puck :0.6
Low-intensity skating with puck :0.5
High-intensity skating with puck :0.4
Two-foot stationary with puck :0.4

Filières énergétiques

Le hockey est un sport intermittent avec des capacités d’accélération et de décélération, des changements de direction rapides et des collisions à impact élevé. Les systèmes prédominants sont le système anaérobie alactique et anaérobie lactique (Powers et Howley 95). Cependant, il faut prendre en considération qu’une fondation solide du système aérobique permet de supporter ces deux systèmes. Une grande partie du conditionnement aérobie permet au joueur de mieux récupérer et de fournir une intensité maximale tout au long du match. La durée d’un shift au hockey est de 39,7 secondes en moyenne (LNH), mais rarement un joueur est en effort maximal durant cette période de temps. Normalement, un shift est composé de petites accélérations jumelées à des périodes où les joueurs glissent sur la glace à basse intensité. Bref, il faut savoir mettre un accent sur le travail en aérobie et en anaérobie au bon moment dans les différentes phases d’entraînement.

Mobilité et stabilité

La mobilité et la stabilité des articulations peuvent directement influencer la longueur des poussées au hockey, car l’amplitude de mouvement a un lien direct sur l’expression de la force et l’efficacité du mouvement sur de longues périodes de temps. Il n’est pas rare pour les joueurs de hockey de manquer de mobilité au niveau des hanches et des chevilles. Si un joueur est incapable de se placer en position optimale pour exécuter une poussée sur la glace, il aura tendance à perdre beaucoup de vitesse. Pour supporter ce concept, Upjohb et al. (2009) ont comparé le patron de patin des joueurs de haut calibre versus celui de ceux de bas calibre. Ils ont trouvé que les joueurs de haut calibre avaient davantage de flexion au niveau des hanches, des genoux et des chevilles. Cela leur permettait d’avoir des poussées plus longues et plus larges sur la glace. Bref, la mobilité et la stabilité des structures influencent largement les capacités d’accélération et la vitesse, qui sont des composantes primordiales de la performance au hockey.

Le corps est composé de plusieurs articulations, où chaque complexe articulaire possède sa propre fonction spécifique. Les traumas et l’inactivité sont des causes fréquentes de troubles entre les articulations et leurs fonctions au niveau de l’exécution du mouvement. Lorsque la situation n’est pas adressée rapidement, cela peut engendrer des blessures à long terme par un mécanisme de surcompensation.

Lorsque la chaîne cinétique devient défaillante, les articulations qui servent à la mobilité prennent la charge de travail des articulations servant à la stabilité et l’inverse est aussi vrai (Cook et Boyle). Ils peuvent alors commencer à présenter un dysfonctionnement.

Lorsqu’une seule composante de la chaîne cinétique ne fonctionne pas adéquatement, cela peut avoir un impact négatif sur les autres structures et éventuellement affecter le mouvement. Le tableau 1 nous donne un guide général à prendre en considération lors de la planification d’un programme pour les athlètes dans une optique de prévention ou de correction.

 

Tableau 1

Liste des articulations, leur fonction spécifique et le dysfonctionnement prédictible dans la majorité des cas.

Articulation(s)

 

Fonction primaire spécifique Dysfonctionnement prédictible
Pied Stabilité Hyper mobilité
Cheville Mobilité Capacité de mouvement réduit
Genou Stabilité Hyper mobilité
Hanche Mobilité Capacité de mouvement réduit
Colonne lombaire Stabilité Hyper mobilité
Colonne thoracique Mobilité Capacité de mouvement réduit
Scapula Stabilité Hyper mobilité
Gléno-humérale Mobilité Capacité de mouvement réduit

Besoins structuraux

Pour développer un joueur de hockey solide et performant, il est important de couvrir plusieurs aspects au niveau de la préparation physique.

 

  • Force de préhension.
  • Équilibre structural.
  • Amplitude de mouvement adéquate.
  • Stabilité du tronc et posturale.
  • Chaîne postérieure forte.
  • Transfert d’énergie des membres inférieurs vers les membres supérieurs.
  • Capacité d’absorber le contact.

Type d’entrainement et qualités physiques

Le hockey est un sport d’accélération sur de courtes distances. La majorité des accélérations se produisent entre 10 et 30 verges sur la glace. La capacité d’accélérer rapidement est donc très importante en ce qui a trait au développement de l’athlète. Lors de l’entraînement hors glace des joueurs de hockey, il est intéressant d’inclure des sprints de courte distance (entre 10-20 verges) dans le but de développer l’accélération. Un accent devra être placé sur le contact au sol plus long, le patron moteur et le positionnement du corps pour un transfert plus direct à la position de poussée au patin. Voici des exemples que j’utilise dans mes séances :

 

  • Lateral half kneeling position
  • Side standing starts
  • Side standing cross-under position

La puissance est également importante et correspond au produit de la force et de la vitesse. La phase de poussée de patin au hockey exige un recrutement neuromusculaire élevé, mais aussi un degré de contraction élevé. Dans la planification du programme d’entraînement et le choix des exercices, il est essentiel de couvrir le spectrum entre la force et la vitesse dans les différentes phases de la préparation.

 

  • Mouvements d’haltérophilie.
  • Mouvements balistiques.
  • Utilisation de chaînes/élastique etc.
  • Mouvement de pliométrie.
  • Temps de réaction à un stimulus visuel/verbal.

 

frrap

 

Il est primordial de développer la première poussée au hockey. Contrairement aux pensées populaires, plutôt que de se concentrer sur le quick feet, le joueur devrait exécuter des poussées diagonales avec une posture adéquate pour un rendement optimal. Le fait de sprinter avec de la résistance peut apporter plusieurs changements ressemblant aux caractéristiques de la poussée de patin. Une étude a même démontré que l’utilisation d’un traîneau avec 32% du poids corporel se résume à une fréquence de ~1.7 foulées/seconde et une durée de contact au sol de~0.22-0.25 seconde (Lockie, Murphy, and Spinks, 2003). Cela se résume en une augmentation de 20% de la durée du contact au sol comparativement au sprint sans résistance. Un plus long contact au sol augmente l’inclinaison du tronc vers l’avant, l’amplitude de mouvement au niveau des hanches, l’extension du genou et la diminution du temps de vol de 40-50%. En résumé, le sprint avec traîneau permet aux joueurs de hockey une plus grande activation des muscles spécifiques durant la phase de patinage sur glace. Ce type de méthode augmente la longueur de la foulée en raison de la capacité à augmenter le niveau de force durant la phase de poussée.

 

Les joueurs de hockey peuvent bénéficier des exercices de pliométrie qui sont initiés à partir d’une position des hanches plus profonde et avec des angles articulaires qui ressemblent à ceux de la position du patin. On peut utiliser les sauts traditionnels (box jump, jump squat, saut latéral, saut diagonal, etc.) à partir de la position basse pour mettre un accent sur la poussée concentrique. L‘idée n’est pas de sur-spécialiser l’athlète, mais plutôt d’optimiser le transfert vers son sport.

 

Le hockey est un sport rapide où la prise de décision et le temps de réaction sont des composantes essentielles. Dans la phase de préparation spécifique du hors-saison, j’expose mes athlètes au stimulus visuel ou verbal, qui force l’organisation cognitive et la réponse physique rapide semblable à celle d’un match. Normalement, l’exercice demande un changement de direction rapide avec une prise de décision. Pour ce faire, j’aime utiliser les lumières de réaction, les balles de réaction, la couleur des cônes, les directives verbales, les drills de miroir, etc.

Le système de F.R.R.A.P. Performance Athlétique existe depuis plusieurs années. Nous avons d’excellents résultats au niveau des performances athlétiques, spécifiquement pour les joueurs de hockey. Les chiffres sont en place pour le justifier. Cependant, le plus grand succès de mon entreprise est dans le fait que les athlètes font confiance à notre système et au personnel qui les encadre.

Références :

Donaldson, Li et Cusimano, Economic burden of time lost due to injury in NHL hockey players.

Hockey Kevin Neeld, MS, CSCSPreparing for the Demands of Professional Hockey

Donskov, Anthony. Physical Preparation for Ice Hockey: Biological Principles and Practical Solutions

Skahan, Sean. Total Hockey Training Human Kinetics

Michael R. Bracko, EdD Biomechanics powers ice hockey performance

(Powers et Howley 95)

Lockie, R., Murphy, A., &Spinks, C. (2003). Effects of Resisted Sled Towing on Sprint Kinematics in Field Sport Athletes. Journal of Strength and Conditioning, 17(4),    760-767.